Médecins à St-Pierre-les-Becquets
Henry Arnaud
Né à Marseille en 1693, il épouse d’abord Catherine L’Archevêque en 1722, puis on le connait comme chirurgien à Québec jusqu’en 1738; par la suite, il s’établit à Sainte-Anne-de-la-Pérade comme marchand. En 1739, il épouse Marie-Marguerite de Chavigny; le 10 septembre 1740, Henry Arnaud et son épouse empruntent 1500 livres au sieur Nicolas-Gaspard-Boucoult, « Conseiller du Roy et lieutenant particulier de la Prévôté de Québec et Lieutenant-général de l’Amirauté de Québec », afin de faciliter son commerce, comme il est écrit dans cet ancien contrat.
Mais un an après, soit en 1741, il est à Saint-Pierre-les-Becquets; nous n’avons pas pu retracer des indices de pratique médicale dans notre village, où il décède le 2 septembre 1743, âgé de cinquante et quelques années. Il est inhumé dans le cimetière de la paroisse.
Dans l’inventaire des biens d’Henry Arnaud dit « vivant marchand demeurant en la seigneurie de Saint-Pierre-les-Becquets », ne figure aucun instrument de chirurgie ni aucun remède. À l’époque, les médecins ne pouvaient pas compter sur leur clientèle, trop pauvre, pour les faire vivre, et ils devaient le plus souvent tirer leurs revenus d’activités commerciales. Séjour fugace, qui a laissé si peu de traces!
Pierre de Sales Laterrière.
Cet homme a eu une vie assez peu conventionnelle; né à Albi, dans le sud de la France, en 1743, il émigre au Canada en 1766, quelques années après la « conquête anglaise »; il a certaines notions de médecine, qu’il accroit avec le docteur Duberger à St-Thomas-de-Montmagny. Ses récits sont sujets à caution, car il cultivait l’art d’agrémenter la vérité.
Il devient inspecteur des Forges du St-Maurice, puis, un peu plus tard, suspecté de sédition, fait un séjour de quatre ans en prison à Québec.
Il s’exile ensuite à Terre-Neuve, pour revenir dans la région de Bécancour, Gentilly, et St-Pierre-les-Becquets entre 1783-1788; il est alors connu comme médecin-apothicaire ambulant, parcourant le territoire jusqu’à St-Hyacinthe, dans une carriole tirée par deux chevaux, vendant des marchandises, des médicaments, et offrant ses services; il arrondit ses fins de mois en faisant du commerce; il a été engagé également par le Père Louis Demers, récollet missionnaire à St-Pierre, pour gérer un moulin au 4ème rang de la seigneurie, et en construire un autre dans la même région.
Il eut des démêlés avec le Père Demers en plusieurs occasions, car la construction et le fonctionnement des moulins, avec les moyens de l’époque, n’étaient pas de tout repos. Ainsi, après une correspondance soutenue entre les deux associés, de plus en plus acide, les tribunaux ont dû trancher.
Le Père Demers, assigné en justice le 2 janvier 1787, par l’avocat et ami du sieur Laterrière, Alexandre Dumas, répondit pour sa défense le 10 février 1787, de façon claire, logique, par l’intermédiaire de l’avocat A. Panet; il semble que monsieur Laterrière était très occupé par sa pratique médicale, et qu’il ne pouvait consacrer le temps nécessaire aux moulins et aux projets du Père Demers.
Le 8 août 1787 est déposée chez le notaire Lévrard, la décision des trois juges, qui annulait le contrat entre les associés, tout en accordant une légère compensation à Pierre de Sales Laterrière.
Celui-ci a dû quitter la région de St-Pierre en 1788, pour acquérir un diplôme de médecine à Harvard, (Massachussetts); en effet, désireuses de mettre de l’ordre dans les activités médicales du Canada, les autorités ont exigé l’obtention d’un diplôme pour exercer la médecine; à cette époque, n’importe qui pouvait se prétendre disciple d’Esculape, et les charlatans étaient monnaie courante.
De retour au Québec, avec son diplôme, il est allé s’établir aux Trois-Rivières, Yamachiche et Baie-du-Febvre, entre 1789 et 1799; pendant cette période, il s’est activé pour que les sages-femmes suivent une formation. Mais il ne revint plus vivre à St-Pierre.
Dans les registres des sépultures de nos paroisses, on lit souvent une note à l’effet que le nouveau-né a été ondoyé par la sage-femme, qui pouvait être une voisine, une parente, sans autre formation qu’une immense bonne volonté; en fournissant des notions d’anatomie, d’hygiène, de techniques particulières, il a probablement contribué à diminuer la mortalité qui alimentait nos cimetières.
C’est peut-être le plus bel héritage qu’il nous a laissé.
Jocelyne Lafond, Alain Manset
Membres de la Société d’Histoire et de Généalogie Lévrard-Becquet
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