L’année 1672 marque une année faste pour plus d’une quarantaine de seigneuries dans la plaine du Saint-Laurent, dont l’une accordée par le comte de Frontenac à un notaire de Québec, ROMAIN BECQUET. De plus, on lui avait octroyé l’île Madame, d’une superficie de 316 arpents, juste en face de Berthier-sur-mer, mais faisant partie de la paroisse Saint-François-Xavier de l’Ile d’Orléans. Becquet s’était octroyé le titre de notaire royal et comme c’était l’époque ou de nombreux colons affluaient en Nouvelle-France, le notaire avait fort à faire pour rédiger contrats de terres, de mariages, pour tous ces censitaires de la côte de Beaupré, et ceux de l’Ile d’Orléans dont une grande seigneurie appartenait à Monseigneur de Laval.
On imagine aisément que le seigneur Becquet n’avait guère le temps de remonter le fleuve pour aller coloniser sa seigneurie située en amont du fief de l’Eschaillons. Sa femme étant décédée depuis quelques années lui laissant deux filles, Marie-Louise et Catherine-Angélique. Lui-même mourra assez jeune, à l’âge de 47 ans, et sa fille Marie-Louise décédera plus tard. Becquet perdra la seigneurie faute de l’avoir exploitée, mais sa fille Catherine-Angélique en reprendra les rênes avec l’aide de son mari, LOUIS LÉVRARD, canonnier de Québec. Elle n’avait que 13 ans lors de leur mariage! Le greffe de Romain Becquet conservé aux Archives Judiciaires de Québec demeure l’un des plus importants pour le Québec du XVIIième siècle.
Un quart de siècle après Becquet, lorsque Louis Lévrard prend possession de la seigneurie au nom de sa femme, en 1703, ce trop long délai dans l’occupation des terres, et l’absence du seigneur pour gérer convenablement la seigneurie provoquèrent des abus, dont la prise en charge du territoire par un certain GILLES MASSON, poitevin de naissance, et colonisateur dans l’âme qui s’était octroyé du titre de “seigneur de la côte et seigneurie de Saint-Pierre-les-Becquets. Il accorda une bonne quinzaine de terres dont l’exploitation anarchique décimait terre et forêt. Aussi, en 1708, Lévrard a recours à une ordonnance de l’intendant Raudot, enjoignant les Masson à “déguerpir” de sa seigneurie. Les Masson, père et fils, poursuivront leur tentative de colonisation jusqu’en 1713, et ça n’est que dix années plus tard que Lévrard déposera son Foy et Hommage au Château Saint-Louis de Québec, le 17 juin 1724, en qualité de tuteur de ses enfants Pierre (20 ans), à la Martinique, Louis, 17 ans, et Charles, 8 ans, et de feue leur mère Catherine-Angélique Becquet. CHARLES LÉVRARD exploitera la seigneurie jusqu’en 1769, et vendra à Charles-François Tarieu Lapérade de Lanaudière, petit-fils de Madeleine de Verchères, seigneuresse de Sainte-Anne-de-la-Pérade.
Huit héritiers se profilèrent, dont Marie-Anne qui épousa FRANCOIS BABY en 1786. En 1830, on compte douze propriétaires. Les Baby feront construire le MANOIR que l’on trouve à proximité de l’église, et lorsque en 1854, les seigneuries sont abolies, c’est un avocat de Québec, JOSEPH-OVIDE TOUSIGNANT, qui, au nom de Sophie Young, apparentée aux Lanaudière, percevra 1,382.51 piastres en capital et intérêt, et établira son pied-à-terre dans le septième rang de Sainte-Sophie-de-Lévrard. C’est en l’honneur de son épouse, SOPHIE, que la paroisse sera érigée canoniquement sous le nom de Sainte-Sophie, en 1874.
La construction de l’église actuelle de Saint-Pierre-les-Becquets a donné lieu à de célèbres conflits qui dégénérèrent en batailles rangées dont la légende “LES COQS BLANCS ET LES COQS NOIRS” et quinze années de luttes stériles de 1824 à 1837. La paroisse Sainte-Cécile-de-Lévrard se détache de la paroisse-mère pour être érigée canoniquement le 11 septembre l908. Elle prend le nom de CÉCILE en l’honneur de Cécile Thomur, épouse de Charles Lévrard.
Yolande ROUX
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